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Etre agricultrice bio, c’est vachement de boulot

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Etre agricultrice bio, c’est vachement de boulot
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28/11/23

Aujourd’hui en France, près d’un chef d’exploitation agricole bio sur deux est une femme. Si la reconnaissance de leur travail et de leur statut a beaucoup progressé, les agricultrices bio continuent, plus que les autres femmes, à subir la double journée : c’est ce qui ressort d’une grande enquête nationale réalisée en 2018 par la FNAB*, en partenariat avec l’Agence BIO, auprès de plus de 2 500 agricultrices bio afin de meuh connaître leur travail et leurs engagements syndicaux ou militants.

La 1ère enquête sur la place des femmes dans l’agriculture bio

Ce n’est pas une coïncidence si cette grande enquête, la première sur le sujet, a été lancée alors que Stéphanie Pageot était la Présidente de la Fédération Nationale d’Agriculture Biologique des régions de France (2013-2018). Comme les rares agricultrices bio élues du Conseil d’Administration de la FNAB qui l’entourent, elle s’interroge sur les freins à l’engagement des femmes dans le réseau, et plus largement, dans les mouvements agricoles. “Nous étions alors convaincus que le manque de confiance en soi et/ou la peur de prendre des responsabilités expliquaient la sous-représentation des femmes dans les conseils d’administration de notre réseau», explique-t-elle (1).

Meuh il fallait aller plus loin : en partenariat avec l’Agence Bio, la FNAB décide alors de lancer une grande enquête dans tout le pays pour en savoir plus sur le profil de ces agricultrices. 2500  y ont répondu, soit environ 1/4 des agricultrices bio françaises. Et l’analyse des réponses fait clairement apparaître que les freins ne sont pas d’ordre psychologique : ce qui leur manque cruellement, c’est du temps !

Jeunes, diplômées... et surchargées

Voici les grandes tendances que cette enquête met en lumière :

  • 60% des agricultrices bio ne sont pas issues d’une famille d’agriculteurs et un 1/3 a choisi ce métier après une reconversion professionnelle.
  • Elles sont plutôt jeunes : en moyenne 6 ans plus jeunes que celles en conventionnel (45 ans contre 51,5 ans)
  • Très diplômées : 40 % ont un niveau bac+3 ou plus, et à la tête de leur exploitation (à 46 %).
  • Engagées : 53 % adhèrent à un syndicat et 21 % des syndiquées ont occupé ou occupent un mandat.

Le travail à la ferme reste réparti de façon genrée : ainsi, quand elles sont installées en couple (le cas de presque la moitié des répondantes), le travail administratif revient quasi systématiquement aux agricultrices (80 %). C’est aussi elles qui, le plus souvent, prennent en charge ce qui concerne la diversification (transformation de la production, vente directe sur place ou au marché) et s’occupent des animaux, alors qu’on retrouve plutôt les agriculteurs sur le tracteur pour s’occuper des cultures.

« Ce n’est pas facile d’être une femme en agriculture”, un milieu encore vachement masculin et patriarcal, regrette Stéphanie Pageot, elle-même éleveuse bio depuis 23 ans en Pays de la Loire (2). “Le pire, pour la plupart des femmes agricultrices, c’est quand un commercial ou un technicien (en général des hommes) vient sur nos fermes et demande: “Où est le patron ?”, comme si nous ne pouvions pas être la patronne. C’est particulièrement agaçant ! » ajoute-t-elle.

Et pis, elles héritent beaucoup plus que les autres françaises des corvées à la maison. Au travail à la ferme s’ajoutent les tâches meuhnagères, avec une inégalité plus flagrante que dans le reste de la population : 66 % des agricultrices bio en couple affirment tout faire ou presque à la maison, alors que seulement 26 % des Françaises faisaient le même constat en 2005 (enquête Relations Familiales et Intergénérationnelles INED-INSEE).

Une situation que l’ex-Présidente de la FNAB déplore

 “Les femmes paysannes font donc une double journée de travail. Et elles la font sans revendiquer d’évolution. Les codes sociaux sont bien ancrés, à tel point que nous avons du mal à y croire, y compris au sein de notre réseau militant » (1).

Cette répartition des tâches est en fait souvent subie plus que choisie : 38 % des agricultrices en couple souhaiteraient être soulagées de certaines tâches ménagères ou liées aux enfants, alors que 33 % aimeraient être délestées de tâches auxquelles elles sont assignées dans le travail à la ferme, principalement les tâches administratives.

Le manque de temps est le principal frein à l’engagement pour 64% d’entre elles : entre le travail et les tâches domestiques, il n’en reste guère pour autre chose. Elles ajoutent deux autres causes qui soulignent les contraintes dans lesquelles elles sont prises : la peur de ne pas arriver à concilier vie de famille, vie professionnelle et vie syndicale (33 %) et l’absence de remplacement possible à la ferme (18 %).

 

Même quand les conjoints sont polyvalents sur les tâches agricoles, le quotidien des femmes agricultrices est très chargé. C’est ce que confirme Lucie, jeune éleveuse bio partenaire de Les 2 Vaches, à la tête d’une ferme dans le Calvados : “On ne peut pas vraiment souffler, c’est un métier qui demande beaucoup de disponibilité mentale. Il faut anticiper et organiser. Plus mon fils, la maison, et le reste de la vie… C’est parfois beaucoup à gérer au quotidien ».

Encore beaucoup de progrès à faire pour arriver à plus d’égalité dans les fermes

 “Favoriser l’égalité entre les personnes pour une société plus juste, plus harmonieuse et plus solidaire” fait partie de la charte des valeurs de la Fédération Nationale de l’Agriculture Biologique adoptée en 2016 : pourtant, le quotidien des agricultrices en bio révèle que l’objectif est loin d’être atteint. Stéphanie Pageot appelle les paysans et paysannes bio à s’engager pour plus d’égalité dans les fermes, et encore davantage en bio, qui se doit de montrer le chemin : “Au delà d’un cahier des charges de production, notre projet est un projet de société ! ».

La FNAB a donc décidé de poursuivre son travail sur la place des femmes en agriculture biologique, tout en se fixant un objectif : atteindre la parité dans les instances locales, régionales et nationales du mouvement. Précieuse pour la Fédération, cette étude doit permettre une prise de conscience pour créer du débat et des échanges et trouver des solutions collectives à ces inégalités.

 

*FNAB :  Fédération Nationale de l’Agriculture Biologique

Sources :

FNAB-Agence bio, Quelle est la place des femmes dans l’agriculture biologique ?, 2018

(1)www.liberation.fr/debats/2018/08/31/l-egalite-femmes-hommes-une-priorite-pour-les-agricultriceseurs-bio_1674253/

(2)https://www.agencebio.org/2021/03/26/la-place-des-femmes-dans-lagriculture-bio-temoignage-de-stephanie-pageot-eleveuse-en-pays-de-la-loire/




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